p Bof Critique par Pierre Ancery PubliĂ© le 01/01/2020 Altaussee, un petit village perdu dans les Alpes autrichiennes, en avril 1945. La chute du IIIe Reich est proche. Les nazis ont choisi ce lieu reculĂ© et sa mine de sel pour y entreposer des Ćuvres dâart pillĂ©es lors des conquĂȘtes de Hitler. Alors que beaucoup de villageois collaborent Ă cette entreprise avec les soldats de la Wehrmacht, certains choisissent dâaider clandestinement les dĂ©serteurs cachĂ©s dans la montagne. Câest le cas de Franz, qui leur fournit de la nourriture. Son ami dâenfance Fritz, quant Ă lui, prĂ©fĂšre ne pas choisir son camp. Mais il va bientĂŽt ĂȘtre forcĂ© de sâimpliquer⊠Paiement sĂ©curisĂ© Sans engagement DĂ©sabonnement simple DĂ©jĂ abonnĂ© ? Je me connecte DĂ©couvrir toutes nos offres RĂ©sumĂ© Avril 1945. La mine de sel du village d'Altaussee, dans les Alpes autrichiennes, a Ă©tĂ© choisie par Hitler et Goering pour abriter une part de l'immense collection d'oeuvres d'art pillĂ©es pour le futur musĂ©e du FĂŒhrer Ă Linz. Contrairement Ă Franz MitterjĂ€ger, son meilleur ami, et Ă sa femme Elsa, qui viennent en aide clandestinement aux dĂ©serteurs de la Wehrmacht cachĂ©s dans la montagne, le taciturne Sepp Rottenbacher s'est abstenu de toute forme de rĂ©sistance pendant le conflit. Alors que sa chute approche, Hitler donne l'ordre au responsable nazi de la province, August Eigruber, de dynamiter la mine avec tous les trĂ©sors qu'elle renferme... RĂ©sumĂ© du casting RĂ©alisateur Gabriela Zerhau Acteurs Fritz Karl Brigitte Hobmeier Harald Windisch Maresi Riegner Verena Altenberger Liebmann Gerhard Norman Hacker Oliver Masucci Philipp Hochmair Francis Fulton-Smith Aaron Friesz Wöss Rainer Sepp Rottenbacher Elsa MitterjĂ€ger Franz MitterjĂ€ger Leni MitterjĂ€ger Eva SchĂ€dler Johann Dörfler Xaver Pröttl Ernst Kaltenbrunner le gauleiter Eigruber le docteur Waldstetter Lukas Dörfler Sick Regarder Pour soutenir le travail de toute une rĂ©daction, abonnez-vous Pourquoi voyez-vous ce message ? Vous avez choisi de ne pas accepter le dĂ©pĂŽt de "cookies" sur votre navigateur, qui permettent notamment d'afficher de la publicitĂ© personnalisĂ©e. Nous respectons votre choix, et nous y veillerons. 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Avant, Abdelkrim, il y avait eu de nombreux rĂ©sistants africains El Hadji Oumar Foutiyou TALL et Maba Diakhou BA au SĂ©nĂ©gal, BĂ©hanzin au Dahomey, Samory TOURE et Alpha Yaya DIALLO en GuinĂ©e. Cependant, toutes ces rĂ©voltes ont Ă©tĂ© matĂ©es ; ce qui a conduit au triomphe du colonialisme entre 1890 et la fin de la PremiĂšre guerre mondiale. Le SĂ©nĂ©galais, Lamine SENGHOR, contemporain dâAbdelkrim, ancien tirailleur sĂ©nĂ©galais, avait thĂ©orisĂ© le colonialisme, Ă Paris, sans lutte armĂ©e ; sa rĂ©sistance Ă©tant purement idĂ©ologique. Par consĂ©quent, bien avant les guerres dâIndochine et dâAlgĂ©rie, câest donc bien Abdelkrim, au dĂ©but du XXĂšme siĂšcle, au Rif, qui a levĂ©, seul, dĂšs 1920, sans le Sultan du Maroc, lâĂ©tendard de lâindĂ©pendance contre la domination coloniale franco-espagnole. Abdelkrim est donc devenu le chef dâun mouvement de rĂ©sistance contre la France et lâEspagne au Maroc, puis lâicĂŽne des mouvements indĂ©pendantistes luttant contre le colonialisme. Quand un pays est occupĂ©, lâessentiel est de coordonner nâimporte quelles forces pour Ă©vincer la prĂ©sence visible gĂȘnante» Ă©crit Pierre FONTAINE, dans Abdelkrim, origines de la guerre nord-africaine». Abdelkrim parcourt le Rif et sensibilise les populations contre lâoppression coloniale au Rif Nous devons, sauver notre prestige et Ă©viter l'esclavage Ă notre pays» dit-il. En 1921, les Espagnols envoient une armĂ©e de 100 000 hommes commandĂ©e par le gĂ©nĂ©ral SYLVESTRE. Le 20 juillet 1921, Ă la bataille dâAnoual, l'armĂ©e espagnole subit un vĂ©ritable dĂ©sastre 15 000 Ă 20 000 soldats tuĂ©s, plus de 5 000 sont faits prisonniers, toute l'artillerie lourde espagnole et un vĂ©ritable arsenal fusils et munitions tombent entre les mains des Rifains. De victoire en victoire, Abdelkrim repousse les Espagnols sur les cĂŽtes. Le gouvernement espagnol, en raison de cette crise, tombe. Pendant deux ans, il a tenu les montagnes du Rif et mis en place une vĂ©ritable RĂ©publique du Rif» de 1921 Ă 1926, vĂ©cue comme un prĂ©lude Ă la libĂ©ration de tout le Maroc. Homme de culture et d'ouverture, celui qui qualifie l'Occident de civilisation du fer» par opposition au Maroc rural et sous-dĂ©veloppĂ©, est tout, sauf un fanatique. Abdelkrim a un projet politique faire du Rif une RĂ©publique moderne, dĂ©velopper l'Ă©conomie et l'Ă©ducation, et la faire reconnaĂźtre par la SociĂ©tĂ© des nations SDN. Il pense faire accĂ©der le Rif Ă l'indĂ©pendance en bonne entente avec les Espagnols. Mais pour les puissances occidentales rĂ©clamant une soumission totale des colonisĂ©s, le pouvoir ne se partage pas Un petit Etat indĂ©pendant et sauvage sur la cĂŽte mĂ©ridionale de la MĂ©diterranĂ©e ne pourrait ĂȘtre que dangereux pour lâEurope» disait le gĂ©nĂ©ral PRIMO de RIVERA. Espagnols et Français, sâallient en 1926, pour vaincre Abdelkrim qui est exilĂ© Ă la un nationaliste irrĂ©ductible, lettrĂ©, stratĂšge et organisĂ©, a secouĂ©, violemment, lâordre colonial au siĂšcle dernier. Sa rĂ©sistance, une tentative vaine de se libĂ©rer du joug de lâĂ©tranger, est devenue le premier Ă©pisode des guerres de libĂ©ration nationale qui allaient survenir. Juste moins de 6 ans aprĂšs la RĂ©volution russe de 1917, un peu partout dans le monde, des rĂ©volutionnaires» ont eu les yeux tournĂ©s vers lâĂ©mir Abdelkrim, dont les mĂ©thodes de guĂ©rilla auront inspirĂ©, par la suite Che Guevara, Mao TsĂ©-Toung et HĂŽ Chi Minh. En effet, Abdelkrim nâa pas inventĂ© la guĂ©rilla, forme de rĂ©sistance du faible contre le puissant, mais il lâa pensĂ©e et thĂ©orisĂ©e, et un redoutable art de la guerre Ce qui se joue au Rif câest toute la puissance coloniale de lâEurope occidentale et surtout le destin de lâEmpire africain de la France» dira le MarĂ©chal Hubert LYAUTEY. En effet, le mouvement dâAbdelkrim retentit jusquâen Bolivie, en Inde, en Chine et mĂȘme au Mexique, et donne des idĂ©es aux rĂ©volutionnaires et indĂ©pendantistes du Tiers-Monde. Des mouvements nationalistes et indĂ©pendantistes naĂźtront en Tunisie et en AlgĂ©rie. LâEspagne, ayant dĂ©jĂ perdu Cuba et les Philippines, et se sentant concurrencĂ©e par la France, est tentĂ©e dâabandonner la rĂ©gion aux rebelles. La guerre du Rif est Ă©galement le premier entraĂźnement des forces antirĂ©publicaines en Europe, et en particulier, lâapprentissage du fascisme pour le gĂ©nĂ©ral Francisco FRANCO 1892-1975 en Espagne et Philippe PETAIN 1856-1951, pour la France. La RĂ©publique du Rif met en lumiĂšre des intĂ©rĂȘts concurrents et convergents des diffĂ©rentes puissantes occidentales, une stratĂ©gie perverse Abdelkrim met tout le systĂšme en danger ; câest pour cela que les alliances presque contre nature», qui vont se constituer sont fondĂ©es sur lâidĂ©e que peu importe qui contrĂŽle le Rif, pourvu que cela ne soit pas un Marocain, mĂȘme Rifain !» Ă©crit Bruno ETIENNE dans la prĂ©face Abdelkrim, une Ă©popĂ©e dâor et de sang». La guerre du Rif entre 1917 et 1923 a provoquĂ© 13 crises ministĂ©rielles en Espagne. En 1923, le gĂ©nĂ©ral Miguel PRIMO de RIVERA suspend la Constitution espagnole et en 1931, le roi Alphonse XIII abdiquera. Ce sont les prĂ©mices du fascisme et la guerre civile en Espagne. En France, le marĂ©chal Hubert LYAUTEY 1854-1934 demande lâĂ©limination dâAbdelkrim. Au cours de la Grande guerre, nos ennemis Ă©taient intĂ©ressĂ©s Ă nous crĂ©er les pires difficultĂ©s» Ă©crit J. ROGER-MATHIEU. Le gouvernement français mit fin au proconsulat de LYAUTEY ; ce qui contribua Ă provoquer, entre communistes et socialistes, la dislocation des Blocs de Gauche. En effet, la France redoute la contagion anticoloniale, la victoire totale dâAbdelkrim aurait changĂ© le cours de lâhistoire dâun pays colonisĂ© depuis peu. En France, les conservateurs mĂšnent une campagne dâune violence inouĂŻe contre Abdelkrim, considĂ©rĂ© comme un dangereux islamiste et un communiste. Charles MAURRAS demande de ne pas tenir compte de la Convention de GenĂšve et de gazer les Rifains. Pour lâextrĂȘme-droite, on ne nĂ©gocie pas avec les insurgĂ©s, on les Ă©crase. Plus que les intĂ©rĂȘts français, câest la civilisation occidentale» qui est menacĂ©e. Abdelkrim, soutenu par ses coreligionnaires musulmans et par lâInternationale communiste, est prĂ©sentĂ© comme lâenfant monstrueux de deux fanatismes. Les journaux rivalisent dans les descriptions des atrocitĂ©s de ces indigĂšnes» retournĂ©s Ă lâĂ©tat sauvage. Pour les milieux colonialistes, la guerre du Rif est censĂ©e ĂȘtre une action de rĂ©tablissement de lâordre». Il ne sâagirait pas dâune guerre coloniale pour sâaccaparer du sous-sol des montagnes du Rif censĂ©s ĂȘtre riche en minerai, mais dâune bataille entre races, dâune guerre contre lâIslam Il fallait faire triompher lâEurope contre lâAfrique et le Christ, contre Mahomet» dit le marĂ©chal LYAUTEY. Il sâagit dâune lutte de lâEurope civilisĂ©e contre une tentative de lâOrient» dira Paul PAINLEVE 1863-1933, prĂ©sident du Conseil. La France de lâĂ©poque est dirigĂ©e, depuis le 11 mai 1924, pourtant de gauche, de tendance colonialiste, avec Gaston DOUMERGUE 1863-1937, en prĂ©sident radical-socialiste de 1924 Ă 1931. Le MarĂ©chal LYAUTEY, pour des raisons de santĂ© et jugĂ© proche des Marocains, retourne en France, le 10 octobre 1925. Cependant, au dĂ©but du XXĂšme siĂšcle, lâOccident connaĂźt une formidable effervescence dâidĂ©es et dâidĂ©aux, en rĂ©action contre le fait colonial Ă son apogĂ©e. Aussi, des intellectuels de gauche sâengagent Ă dĂ©truire ce systĂšme oppressif qui exploite et asservit lâhomme africain. Câest dans ce contexte que seuls, les communistes naissant, ayant rompu avec les Socialistes depuis le CongrĂšs de Tours de 1920, soutiennent Abdelkrim, Ă travers un tĂ©lĂ©gramme de 1924 de Pierre SEMARD 1887-1942, SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du et Jacques DORIOT 1898-1945, responsable des jeunesses communistes. Un comitĂ© dâaction est mis en place sous la direction de Maurice THOREZ 1900-1964. Des intellectuels Louis Aragon, AndrĂ© Breton, Robert Desnos, Paul Ăluard, lancent, Ă lâappel de Henri BARBUSSE 1873-1935, une tribune dans le journal lâHumanitĂ© du 2 juillet 1925. Une grĂšve gĂ©nĂ©rale est dĂ©crĂ©tĂ©e le 12 octobre 1925. Les surrĂ©alistes AndrĂ© BRETON, Louis ARAGON, Raymond QUENEAU, horrifiĂ©s par la PremiĂšre guerre mondiale, se sont dressĂ©s contre les visĂ©es coloniales contre le Rif Pas un sou, pas une goutte de sang pour le Rif» ou encore Hissez le drapeau rouge, nâembarquez pas de cadavres en sursis pour la terre africaine». Pour Louis ARAGON 1897-1982 Abdelkrim fut lâidĂ©al qui berça notre jeunesse».Le passĂ© devrait instruire le prĂ©sent. Lâaction de rĂ©sistance dâAbdelkrim reste en effet, dâune trĂšs grande actualitĂ©, 60 ans aprĂšs les indĂ©pendances, lâesprit colonialiste et esclavagiste restent plus que jamais vivace. Abdelkrim, nĂ© dans un pays tiraillĂ© entre plusieurs tribus, au dĂ©but sans armes, sans guerriers aguerris, a rĂ©sistĂ©, vaillamment Ă deux puissances coloniales Depuis des siĂšcles, le MĂ©tropolitain a oubliĂ©, ou nâa pas tenu compte, que, sâil sâĂ©levait chaque fois un peu plus, le niveau matĂ©riel et moral de lâindigĂšne, celui-ci, dans sa simplicitĂ©, Ă©voluait» Ă©crit Jean RENAUD. Cela atteste donc, pour les pays africains luttant de nos jours contre des rĂ©gimes prĂ©historiques et monarchiques, que la politique reste, essentiellement, une question de volontĂ©. Si lâon veut, on peut . Câest lĂ©gitime de se remĂ©morer de lâaction hĂ©roĂŻque dâAbdelkrim, afin de combattre lâamnĂ©sie et rallumer la flamme de la lutte contre toutes les forces de domination ou dâoppression. En effet, Abdelkrim a Ă©tĂ© un jalon important de toute une gĂ©nĂ©alogie militante dont il faudrait perpĂ©tuer le combat. Si la guerre du Rif est aujourdâhui un peu oubliĂ©e, elle a Ă©tĂ©, pour deux gĂ©nĂ©rations nouvelles, un moment marquant, au point dâavoir Ă©tĂ© qualifiĂ©e par le grand historien Charles-AndrĂ© JULIEN de plus difficile guerre coloniale quâait faite la France» avant la dĂ©colonisation. La France et lâEspagne, ont dĂ» se coaliser et aligner prĂšs de 500 000 hommes. Le marĂ©chal Hubert LYAUTEY, considĂ©rĂ© comme mou» est assistĂ© de 42 gĂ©nĂ©raux, dont le gĂ©nĂ©ral Philippe PETAIN, ainsi que dix escadrilles aĂ©rienne pour venir Ă bout du Rif. En effet, la Guerre du Rif ne fut rĂ©primĂ©e qu'Ă l'aide des troupes françaises et en particulier de l'aviation et des armes chimiques le gaz hypĂ©rite» ou gaz moutarde». Le Rif a Ă©tĂ© une guerre particuliĂšrement meurtriĂšre De toutes les entreprises coloniales, elle est celle qui aura coĂ»tĂ© le plus cher en hommes et en argent» Ă©crit en 1927, Victor littĂ©rature abondante, notamment en espagnol, en portugais et en arabe, dont je nâai pas pu prendre connaissance, est consacrĂ©e Ă la guerre du Rif . Un agent secret français de 1924 Ă 1926, LĂ©on GABRIELLI 1877-1950 a produit ses mĂ©moires sur le Rif. Abdelkrim y est dĂ©crit comme commandeur des croyants et chef dâune RĂ©publique Personnellement, je nâai aucune ambition, je nâaspire ni au Sultanat, ni au pouvoir absolu. Si je suis une gĂȘne, je suis prĂȘt Ă disparaĂźtre pour laisser ma place Ă un autre» rapporte-t-il un propos dâAbdelkrim. Jacques LADREIT de LACHARRIERE 1881-1958, qui a sans doute consultĂ© les archives secrĂštes françaises, est le premier Ă avoir Ă©crit sur le Rif, un ouvrage rigoureux et documentĂ©. En dĂ©pit dâun point de vue colonial, il dresse un portrait intĂ©ressant dâAbdelkrim qualifiĂ© de moderniste». Walter Burton HARRIS 1866-1933, un correspondant du Times au Maroc, a Ă©crit en 1927, France, Spain and the Rif».Cependant, lâaction dâAbdelkrim demeure encore enfouie sous le tapis de lâoubli en raison de la puissante propagande coloniale, voulant camoufler sa retentissante dĂ©faite au dĂ©but du siĂšcle dernier Peu dâhommes politiques ont laissĂ©, dans lâhistoire de leur Ă©poque, une trace aussi fulgurante que celle de Mohamed Ben Abdelkrim dit Abdelkrim, ou encore lâEmir, et ont Ă©tĂ©, par la suite, autant volontairement occultĂ©s. Un homme Ă©tonnamment en phase avec son Ă©poque. Un homme dont la stratĂ©gie guerriĂšre a Ă©branlĂ© le systĂšme colonial alors Ă son apogĂ©e et dont la prescience politique de rĂ©formateur a jetĂ© les bases dâun Etat prĂ©-moderne et rĂ©volutionnaire pour son temps et ses moyens» Ă©crit Zakya DAOUD dans Abdelkrim, une Ă©popĂ©e dâor et de sang». La guerre, en dĂ©pit de cette masse de documents, pose une question essentielle comment interprĂ©ter cet Ă©vĂ©nement majeur. Dans son obsession identitaire et de hiĂ©rarchisation des cultures, ne datant pas de nos jours, le colonisateur lâa prĂ©sentĂ©e comme le conducteur de la guerre sainte contre lâOccident Sorte de VercingĂ©torix berbĂšre, il Abdelkrim a dâabord personnifiĂ©, au milieu des siens la rĂ©sistance contre lâenvahisseur chrĂ©tien, devenant en mĂȘme temps, par la contagion de lâexemple, le symbole de la vieille BerbĂ©rie anarchique hostile Ă la formation historique de lâempire chĂ©rifien» Ă©crit Robert MONTAGNE. En fait, et en dĂ©pit des calomnies, Abdelkrim, un nationaliste et partisan de lâunitĂ© africaine, tout en plaidant pour la renaissance de la culture islamique, admirait, tout autant, le progrĂšs europĂ©en moderne sur le plan matĂ©riel et culturel. Abdelkrim Ă©tait un penseur rĂ©formiste, loin de vouloir mettre en place un Califat islamique, mais adaptĂ© Ă un Etat rĂ©publicain Ă lâeuropĂ©enne. Abdelkrim sâest lui-mĂȘme dĂ©fini, comme un hĂ©ritage multiculturel Je suis de race berbĂšre et j'ignore Ă quel point vous nous sous-estimez mais j'affirme cependant que les berbĂšres sont des gens avancĂ©s, qui ont hĂ©ritĂ© de nombreuses civilisations. Vous ignorez par exemple qu'en tant que berbĂšre, je suis d'origine juive. Mes ancĂȘtres sont ensuite devenus chrĂ©tiens, puis musulmans. Maintenant nous parlons l'arabe, langue du Coran, nous nous entendons en berbĂšre, langue de nos aĂŻeux mais nous conversons aussi en français, langue de notre pays asservi» dit-il dans un entretien avec un journal Ă©gyptien, Aker Saa» de 1952. Abdelkrim est un berbĂšre europĂ©anisĂ© en surface, qui fit ses Ă©tudes occidentales Ă Melilla. Câest un financier consommĂ© et câest de bonne guerre les calomnies des Occidentaux Ă son Ă©gard le qualifiant de barbare». Abdelkrim, un esprit libre, a voulu rĂ©unifier diverses tribus Quand un peuple, Ă©pris dâindĂ©pendance, habituĂ© Ă lâinsurrection et entraĂźnĂ© aux razzias, a conscience de son Ă©parpillement et de sa mobilitĂ© qui lui permettent de faire longtemps Ă©checs aux armĂ©es modernes ; il peut, sâil y voit des avantages, tolĂ©rer des amateurs, mais il se rĂ©volte contre les huissiers» Ă©crit ROGER-MATHIEU. Le colonialisme ne tolĂ©rait pas les rebelles La hantise dâAbdelkrim obsĂ©dait lâopinion. Le Rif semblait sâincarner dans une seule silhouette. Il ne sâagissait plus que de capturer le Seigneur de la guerre paysanne» Ă©crit Victor rĂ©volte dâAbdelkrim en rĂ©alitĂ©, a secouĂ© le monde occidental, tout autant que les Etats musulmans de lâĂ©poque et a mis en lumiĂšre, les lignes de fracture du monde arabe aprĂšs la dislocation de lâEmpire ottoman. Moustapha KEMAL 1881-1938 voulant mettre en place une RĂ©publique et des rĂ©formes dont le droit de vote des femmes, dans un pays musulman. Lâensemble musulman est donc fracturĂ© par un autre partage annonciateur, entre les rĂ©sistances tribales ou rurales et les monarchies arabes. Dans ses mĂ©moires recueillis par un correspondant de guerre du Matin», J ROGER-MATHIEU, publiĂ©s en 1927 on y dĂ©crypte cette pensĂ©e conciliant lâIslam et la modernitĂ© et ses confessions sincĂšres» Ă bord du bateau, lâAbda», le conduisant en exil, Ă la RĂ©union. La sincĂ©ritĂ© de ces mĂ©moires attribuĂ©s Ă Abdelkrim a Ă©tĂ© mise en doute, par certains chercheurs, notamment les auteurs espagnols estimant que ce texte est dĂ©favorable Ă leur pays. Cependant, ROGER-MATHIEU, dont la rhĂ©torique, dans lâintroduction, celle du colonialisme français, semble avoir laissĂ© une grande libertĂ© dâexpression Ă Abdelkrim, qui comprenait le français, sans le parler. Abdelkrim a Ă©tĂ© assistĂ© par son frĂšre, lors des entretiens et la transcription des rĂ©ponses en arabe. Il faut reconnaĂźtre que nous y trouvons des donnĂ©es historiques qui, soumises Ă vĂ©rifications historiques, sont dignes de foi» Ă©crit Mohamed TAHTAH. Câest donc un document historique, mĂȘme sâil faut lâaccueillir avec une distance critique, notamment dans sa deuxiĂšme partie. On y entend, de façon claire, la voix dâAbdelkrim qui se sentait investi dâune politique africaine» en vue de protĂ©ger nos nationaux dans le Maghreb» et de rĂ©agir contre lâanarchie». Il existe deux autres mĂ©moires dâAbdelkrim. Abdelkrim a rĂ©digĂ© dâautres mĂ©moires, pendant son exil, de 1926 Ă 1947, Ă la RĂ©union. Germain AYACHE mes a consultĂ©s, mais Ă lâĂ©poque il nâexistait que des bribes de ces seconds mĂ©moires dâune soixantaine de pages. En 2017, Ă Rabat ont Ă©tĂ© publiĂ©s les mĂ©moires complets de 173 pages en arabe et en français, mais peu accessibles. Abdelkrim aurait Ă©crit dâautres mĂ©moires pendant son sĂ©jour en Egypte de 1947 Ă 1963, mais personne ne peut en administrer la preuve irrĂ©futable. Le beau-frĂšre dâAbdelkrim, son ministre des affaires Ă©trangĂšres et confident, Muhammad ARZQAN, a produit des mĂ©moires, inĂ©dits, en arabe. Un texte donc peu accessible. Au moment oĂč Ahmad SRIJ a recueilli le tĂ©moignage de Muhammad ARZAQAN, celui-ci, en rĂ©sidence surveillĂ©e, nâĂ©tait pas libre de sâexprimer. Ce document comporte un intĂ©rĂȘt sur lâorigine de la famille dâAbdelkrim, cependant, la chronologie est chaotique, et Ă bien des Ă©gards, il sâagit dâune biographie, largement romancĂ©e Les hommes, surtout les nationalistes de tous les pays, prĂ©fĂšrent bien souvent une histoire plus fausse que la vraie pour survivre ensemble» Ă©crit Bruno ETIENNE. Toutefois, Germain AYACHE, un chercheur marocain, a exploitĂ© dans sa thĂšse, en 1981 Les origines de la guerre du Rif», les mĂ©moires dâAZARQAN. Germain AYACHE a pu dĂ©montrer que la sociĂ©tĂ© rifaine nâĂ©tait pas sauvage», anarchique et insoumise Ă lâautoritĂ© du Sultan du Maroc, comme le prĂ©tendait la propagande coloniale. Les relations ne sont dĂ©tĂ©riorĂ©es quâau moment oĂč le Maroc avait perdu sa souverainetĂ© et que le colonisateur voulait rĂ©duire au silence la rĂ©bellion des Rifains. Germain AYACHE, fidĂšle Ă lâorientation du Grand Maroc de son pays, dĂ©peint Abdelkrim, un hĂ©ros, comme un pro-espagnol» et la rĂ©sistance rifaine ne serait quâun Ă©piphĂ©nomĂšne de la rĂ©sistance marocaine, un haut fait national marocain Les Rifains nâĂ©taient pas que des Rifains. Ils Ă©taient des Marocains. Ils avaient la mission sĂ©culaire de dĂ©fendre les cĂŽtes contre les invasions des ChrĂ©tiens» Ă©crit-il. Qui Ă©tait Abdelkrim ?De son nom complet Mohamed ben Abdelkrim AL-KHATTABI, est nĂ© vers 1882 Ă Ajdir, prĂšs dâAl-Hoceima, au Maroc et dĂ©cĂ©dĂ© le 6 fĂ©vrier 1963 au Caire en Ăgypte, de son nom complet Mohamed ben Abdelkrim El Khattabi. Il est descendant direct de SI Mohammed Ben Abd-El-Krim, originaire du Hedjaz, de Yambo, sur les bords de la Mer Rouge. Sa famille est venue sâĂ©tablir au Maroc vers lâAn 900, entre la Baie dâAlhucemas et Targuirt. Il nâest ni descendant du ProphĂšte Mohamet, ni arabe, mais un BerbĂšre qui appartient Ă la tribu des BĂ©ni Ouriaghel, unie, forte et clairvoyante, et ayant donc une ascendance sur les autres tribus Ă©parses. Le Rif oriental est un peuple de 3 millions dâhabitants, 18 tribus berbĂšres sĂ©dentaires, vivant sur un territoire long de 300 km et large entre 50 Ă 80 km. Abdelkrim est trĂšs attachĂ© Ă lâhistoire et la libertĂ© de son peuple, qui a pendant longtemps refusĂ© de se plier Ă lâautoritĂ© du Sultan du Maroc. Le Rif, appelĂ© par les PhĂ©niciens Agrath», pour les Romains Ad Ripam», pour les Arabes, Er Rif», dĂ©signe, sous ce nom, la rĂ©gion limitĂ©e au Nord par la MĂ©diterranĂ©e, Ă lâOuest par le massif des DjĂ©bala, et au Sud par une chaĂźne montagneuse, dite du Rif. En effet, le colonisateur fait dĂ©marrer lâhistoire de son pays avec les occupations espagnoles et françaises. Pourtant, lâHistoire indique le contraire ; ce sont les Africains qui avaient dâabord occupĂ© lâAndalousie. En effet, Ă la fin du XIĂšme, les Almoravides, venus de lâAdrar, avaient fondĂ© un royaume Ă©phĂ©mĂšre qui sâĂ©tendait de la Mauritanie Ă lâAndalousie, avec pour capitale Marrakech. Les Almohades, originaires de lâAtlas, renversent les Almoravides, et sâinstallent eux aussi en Andalousie et infligent une sĂ©vĂšre dĂ©faite au roi Alphonse VIII de Castille et de TolĂšde 1155-1214, en 1195, Ă Alarcos. Tous les Etats chrĂ©tiens dâEurope, sentant la menace africaine, sâunissent pour battre le Calife abbasside de Bagdad, Abdou Al Abbas AN-NASIR 1158-1225, en 1212, Ă la bataille de Las Navas Tolosa. Bien que la prĂ©sence des Espagnols soit ancienne au Rif, elle Ă©tait limitĂ©e aux enclaves des villes de Ceuta, prise en 1305 et Melilla en 1497, et nâavait donc aucune prise sur lâintĂ©rieur du Rif. Ces possessions espagnoles ont Ă©tĂ© pendant longtemps contestĂ©es par le Portugal, mais aussi par le Maroc, les Espagnols ayant Ă©tĂ© dĂ©logĂ©s de la Marmora en 1861 et de Larache en 1689. Auparavant, le Sultan Moulay Ismail BEN CHERIF 1645-1727 a assiĂ©gĂ© Ceuta, pendant 30 ans, sans succĂšs. En 1804, une rĂ©volte dans le Rif, menace gravement Ceuta. En 1871 et en 1893, les Rifains encerclent et attaquent, sans succĂšs, Melilla ; un traitĂ© du 5 mars 1894 sera conclu avec les Marocains. Ils se rĂ©voltent Ă©galement en 1909. Câest la guerre hispano-marocaine de 1859-60 qui marque le dĂ©but, non pas de la colonisation espagnole, mais de sa rĂ©elle prĂ©sence Ă©conomique. A la confĂ©rence dâAlgĂ©siras Espagne, la France qui avait des visĂ©es sur le Maroc, un Etat jamais colonisĂ©, lui consent une libertĂ© Ă©conomique sans aucune inĂ©galité». Cependant, la France met sous tutelle le Maroc, un Etat encore indĂ©pendant, Ă travers le droit de venir en aide au Sultan dans lâorganisation de la police». La Banque dâEtat du Maroc est Ă©galement sous tutelle des puissances occidentales Allemagne, Espagne et Angleterre. En raison de troubles internes, le gĂ©nĂ©ral LYAUTEY occupe Oujda le 29 mars 1907. Il faudra attendre lâannĂ©e 1912 par 2 traitĂ©s Franco-marocain du 30 mars et franco-espagnol du 27 novembre pour que le Maroc soit partagĂ© en deux protectorats, l'essentiel du Rif revenant aux Espagnols, une terre montagneuse, jugĂ©e presque infranchissable et hostile aux Ă©trangers. Si lâEspagne est restĂ©e retranchĂ©e dans Ceuta et Melilla, la France entrepris de soumettre le Maroc Ă un rĂ©gime, non pas de protectorat, mais de colonisation, de fait. Les tribus du Rif, sans sultan du Maroc, essayĂšrent de combler ce vide, en se remettant Ă lâautoritĂ© de la famille AL-KHATTABI. Le Maroc sera indĂ©pendant le 2 mars 1956. Le 14 novembre 1975 lâEspagne rendra le Sahara espagnol au Maroc. Or, LĂ©on LâAfricain ou Hassan AL-WAZZAN 1496-1548, historien, gĂ©ographe et philologue, avait dĂ©jĂ dĂ©crit le Rif au XVIĂšme siĂšcle Les GumĂ©ras font semblablement leur demeurance aux monts de la Mauritanie, câest-Ă -dire aux monts regardant la mer MĂ©diterranĂ©e, tenant et occupant toute la riviĂšre qui sâappelle Rif» Ă©crit-il dans De lâAfrique contenant la description de ce pays». Abdelkrim AL-KHATTABI dit Si Zian 1860-1920, son pĂšre, un jurisconsulte a Ă©tĂ© nommĂ© Cadi, par le sultan du Maroc, Moulay Al-HASSAN, le 10 juin 1879. La famille AL-KHATTABI respectait lâautoritĂ© du Maghzen, du Sultan du Maroc, aussi longtemps que ses tribus seront libres. Jouissant dâun prestige incontestable, en raison de sa droiture, de sa sagesse et de son amĂ©nitĂ©, il avait eu deux fils Mâhammed 1872-1967 et Abdelkrim, qui passent leur jeunesse chez leur oncle, Abdelsalam AL-KHATTABI Ă Ajdir. Abdelkrim se rend, par la suite, Ă TĂ©touan et Ă FĂšs aux universitĂ©s de Attacine et Saffarine, pour prĂ©parer lâentrĂ©e Ă la grande universitĂ© de Karaouine, pour le droit islamique. Abdelkrim Ă©tudie le droit espagnol Ă lâuniversitĂ© de Salamanque, en Espagne. Ma jeunesse est semblable Ă celle de mon frĂšre. Jâai commencĂ© mes Ă©tudes auprĂšs de mon pĂšre ; puis, je me suis rendu Ă TĂ©touan et Ă Melilla. A la fin de mes Ă©tudes primaires, nous sommes dĂ©signĂ©s comme titulaires dâune bourse du gouvernement pour aller continuer Ă Mogador, nos Ă©tudes, dans une Ă©cole normale, oĂč je devins professeur au bout de deux ans» Ă©crit Abdelkrim dans ses mĂ©moires. AprĂšs le baccalaurĂ©at, il regagne Madrid, pour prĂ©parer son admission Ă lâĂ©cole des Mines. Durant son sĂ©jour en Espagne, Abdelkrim a rencontrĂ© de hautes personnalitĂ©s politiques, dont le Sous-secrĂ©taire dâEtat des affaires du Maroc, ainsi que le Roi dâEspagne qui voulait lâinciter Ă une politique de collaboration avec son pays. Cependant, Abdelkrim jugera que les conceptions des hommes politiques espagnols Ă©taient radicalement incompatibles, avec les principes de son pĂšre, qui voulait, pour le Rif, non seulement la prospĂ©ritĂ©, mais aussi la libertĂ©, et son dâune intelligence vive et souple, Abdelkrim a Ă©tĂ© nommĂ© professeur et traducteur dans une Ă©cole indigĂšne Ă Melilla, aprĂšs trois annĂ©es de professorat, il fut nommĂ© Cadi, juge musulman, Ă Melilla. Entre 1906 et 1915 il fut journaliste au quotidien de Melilla, El Telegrama del Rif», section langue arabe, oĂč il prĂ©conisaient la laĂŻcitĂ© et la coopĂ©ration avec les occidentaux afin de libĂ©rer la Oumma de lâignorance et du sous-dĂ©veloppement. Abdelkrim rendait des visites frĂ©quentes Ă son pĂšre, un partisan de lâunitĂ© africaine» prĂ©cise-t-il. Son pĂšre Ă©tait chef politique et chef de guerre JâĂ©tais entraĂźnĂ© au baroud », au jeu du fusil et de la poudre» dit Abdelkrim, dans ses mĂ©moires. Au retour, Ă son village, son pĂšre lâinitie Ă la politique et lui confie une mission qui consistait Ă renseigner le Maghzen sur la politique et sur les intentions de lâensemble du Rif, Ă son Ă©gard. Son pĂšre envisageait un regroupement dans le Rif, composĂ© de 18 tribus et 3 millions dâĂąmes, de toutes les forces indigĂšnes, pour battre Jilali Ben DRISS, alias Rogui Bou Hamara 1860-1909, infĂ©odĂ© au Sultan du Maroc Les luttes intestines dans les villages y sont si constantes, si implacables, que nul nâose construire sa maison prĂšs de celle du voisin, si bien que chaque regroupement humain se compose de fermes isolĂ©es, jalousement entourĂ©es de figuiers de Barbarie. Lâanarchie est telle quâil y a vingt ans, de vĂ©ritables guerres dâextermination se livraient entre les clans rivaux» Ă©crit Hubert MONTAGNE. Tribus batailleuses et grandes pillardes, elles savaient aussi sâunir devant un grave danger venant de lâextĂ©rieur. Abdelkrim, un homme lettrĂ© et en raison de sa science religieuse, avait suffisamment de prestige pour circuler dans ce monde de chaos et nĂ©gocier avec les diffĂ©rentes tribus. Son pĂšre, suite Ă cette mission, obtint lâalliance de tous les chefs rifains. A cette Ă©poque, le Maroc Ă©tait en proie aux pires dissensions, Moulay Hafid venait de battre son frĂšre Abdel-El-Aziz. Son pĂšre sâallia donc avec Moulay Hafid pour battre Bou Hamara au Rif. Il mourra dans des conditions atroces Ă 1915, alors quâil est Cadi, les Espagnols emprisonnent Abdelkrim, Ă la demande du marĂ©chal Hubert LYAUTEY en raison de relation que jâavais entretenues avec un certain Francisco Farle, un individu dâorigine allemande, habitant Ă Melilla» dit Abdelkrim. Câest en effet, Ă ce moment que lâEspagne entre dans la danse. LâAllemagne, dans un jeu trouble, incitait les Marocains Ă lâindĂ©pendance Tout Ă©tait confus, au dĂ©but de la Grande guerre. La propagande contre la France Ă©tait active et hostile. LâAllemagne flattait les ambitions nationales et locales» Ă©crit Abdelkrim. En effet, en 1944, Francisco FARLE lui avait promis des armes et de lâargent, sâil se rĂ©voltait contre le Maroc Le rĂȘve de lâaffranchissement de lâĂ©tranger se dressait devant moi» Ă©crit Abdelkrim dans ses mĂ©moires. Abdelkrim ne voulait pas se lancer dans une guerre contre le Maroc, mais voulait seulement lâindĂ©pendance du Rif Nous nâen voulons quâĂ lâEspagne. Elle nâa pas su nous comprendre ; elle a rĂ©voltĂ© tous nos sentiments» disait Abdelkrim. Homme fier et Ă©nergique ne supportant pas les injures et les vexations, il tente de sâĂ©vader et se casse la jambe. Il sera libĂ©rĂ© aprĂšs 11 mois de dĂ©tention ; les Espagnols voulaient lâarmer contre la France, ce quâil lâincarcĂ©ration dâAbdelkrim, son pĂšre avait entretenu, tout de mĂȘme, des relations normales avec les Espagnols, jusquâau moment ils voulaient Ă©tablir au Rif un rĂ©gime de protectorat, une sorte de colonie dĂ©guisĂ©e câest faire preuve dâune Ă©trange mĂ©connaissance de lâĂąme musulmane, et particuliĂšrement rifaine, que de croire quâon peut triompher par le mensonge et la calomnie» dit Abdelkrim. Entre 1912 et 1920, son pĂšre voulait rester neutre, mais la persĂ©cution des Espagnols sâaccentuait sur le Rif Il nâexiste pas assez de mots forts pour qualifier leur cruautĂ©, sans exemple, Ă lâĂ©gard de nos populations» Ă©crit Abdelkrim. LâEspagne a essayĂ© de sĂ©duire la famille KHATTABI, en 1920, en proposant de rĂ©intĂ©grer Abdelkrim dans ses fonctions dâenseignants et dâoctroyer une bourse Ă son grand-frĂšre pour Madrid Mes fils ne retourneront vers vous que si lâEspagne est dĂ©cidĂ©e Ă collaborer, rĂ©ellement, avec nous» dit son pĂšre. Un agent secret est alors envoyĂ© par lâEspagne, pour surveiller la famille AL-KHATTABI. Une campagne de calomnies, propagande et de discrĂ©dit est engagĂ©e Ă lâencontre des AL-KHATTABI, prĂ©sentĂ©s comme des ennemis» de lâEspagne. En riposte, le pĂšre dâAbdelkrim organise, non pas une action violente, mais pacifique et politique de rĂ©sistance Ă lâoccupant espagnol. Son pĂšre tombe malade, et meurt dans des conditions suspectes, probablement empoisonnĂ©. Avant de mourir, le pĂšre dâAbdelkrim recommanda Ă ses enfants de ne pas laisser asservir, honteusement» le Rif, et si cette mission se rĂ©vĂ©lait impossible, de se mettre sous la protection de la France, un pays juste et humain». La mort du pĂšre dâAbdelkrim nâa pas de rĂ©volte, mais un dĂ©bat, dans les diffĂ©rentes tribus, sur la stratĂ©gie Ă adopter Si vous ne pouvez pas dĂ©fendre le Rif ; si vous ne pouvez pas en faire un pays libre et fortement organisĂ©, Ă©vacuez-le» dit Mohammed TAHAN, un notable. A cette Ă©poque, Abdelkrim voulait Ă©viter la guerre Ă son peuple ; il recherchait une solution nĂ©gociĂ©e avec lâEspagne Nous dĂ©cidions dâĂ©crire aux Espagnols pour les conjurer de renoncer Ă cette politique belliqueuse, et dâorganiser, avec notre collaboration loyale, un rĂ©gime profitable Ă leur pays, comme au nĂŽtre» dit Abdelkrim. Cependant, lâEspagne ne jugeait pas nĂ©cessaire de nĂ©gocier avec des tribus jugĂ©es arriĂ©rĂ©es, divisĂ©es et faibles. En raison de cette dĂ©marche modĂ©rĂ©e de Abdelkrim Ă lâĂ©gard des Espagnols, sa famille est considĂ©rĂ©e par les nationalistes rifains, comme suspecte, vendue» aux espagnols. A lâĂ©poque, Abdelkrim nâavait ni armes, ni argent, ni armĂ©e fiable et disciplinĂ©e, mais il connaissait son pays et a engagĂ© une guĂ©rilla contre les Espagnols Les Rifains avaient un avantage important sur leurs adversaires ils combattaient dans leur pays quâils Ă©taient seuls Ă connaĂźtre dans ses moindres mĂ©andres ; ils avaient repĂ©rĂ© les passages, les endroits propices pour engager la lutte. Ils savaient que, lorsque dans certaines parties de leurs montagnes le combat au fusil nâĂ©tait pas efficace, il Ă©tait prĂ©fĂ©rable de recourir Ă une avalanche de rochers qui, bien prĂ©parĂ©e, offrait le double avantage dâobstruer les dĂ©filĂ©s tout en dĂ©cimant lâadversaire» Ă©crit Pierre FONTAINE. Câest Ă ce moment que le gĂ©nĂ©ral Manuel SYLVESTRE, un militaire trĂšs brave, mais dĂ©pourvu de tout sens politique, dĂ©cide dâattaquer le KelatĂšs et Porto-Nuevo, pour chasser Abdelkrim de son pays. Pourtant, Abdelkrim refuse lâoffre dâEtchevarieta, de 20 000 pesetas, pour attaquer le Maroc. Le nationaliste rifain a toujours rejetĂ© la cupiditĂ© et le mensonge. Les Espagnols occupent alors Dar-Abara, en pays Tensamane ; ce qui donna lâoccasion Ă Abdelkrim dâengager son premier combat de rĂ©sistance dâenvergure. La partie Ă©tait pourtant risquĂ©e Je disposais, Ă cette heure, de 300 guerriers. Je reviens me mettre Ă leur tĂȘte. Et malgrĂ© une pauvretĂ© en munitions, je dĂ©clenchais la contre-attaque. AprĂšs un combat des plus durs, ma troupe rĂ©occupa Dar-Abara» Ă©crit Abdelkrim. Au cours de cette bataille, lâEspagne a perdu 400 soldats, dont 2 capitaines et 4 lieutenants et surtout un lot important dâarmes. 9 morts rifains. Abdelkrim vient de gagner son premier galon de chef de guerre câest un mĂ©tier facile que de commander devant lâennemi. Il suffit du bon sens et de la dĂ©cision» dit-il. Abdelkrim saisit cette nouvelle gloire pour renforcer lâunitĂ© du bloc rifain, ainsi que ses positions acquises, tout en sâabstenant de toute contre-attaque. A Sidi-Boyane, le gĂ©nĂ©ral SYLVESTRE y laisse 317 morts ainsi que des armes, contre 17 Rifains. Les canons sont mis en a eu vent que le ravitaillement des Espagnols est dĂ©fectueux ; il dĂ©cide en consĂ©quence de couper leurs communications avec Tizi Aza, leur base. Le gĂ©nĂ©ral SYLVESTRE dĂ©cide alors de contre-attaquer et Ă chaque fois, Abdelkrim rĂ©colte un important butin en armes et munitions, dont 15 canons. Le gĂ©nĂ©ral SYLVESTRE donne alors lâordre dâĂ©vacuer LâarmĂ©e espagnole battait en retraite, littĂ©ralement, affolĂ©e, dans le dĂ©sarroi si complet que nos guerriers eux-mĂȘmes avaient de la peine, en progressant si rapidement, Ă croire Ă la rĂ©alitĂ© de leur victoire, Ă la catastrophe oĂč sombrait lâennemi» dit Abdelkrim. Plus de 100 postes militaires, tombĂšrent aux mains des rifains. Le bilan est lourd pour les Espagnols 200 canons, 20 000 fusils, des obus, des milliers de cartouches, des vivres, des mĂ©dicaments, 700 prisonniers, 15 000 morts et blessĂ©s espagnols, dont le gĂ©nĂ©ral MORALES. Abdelkrim qui avait de lâestime pour ce gĂ©nĂ©ral, fit transporter son corps Ă Melilla. A Mont-Arruit, le gĂ©nĂ©ral NAVARRO et 2 colonels furent prisonniers. Estimant que son organisation militaire Ă©tait encore embryonnaire, Abdelkrim sâarrĂȘta aux portes de Melilla, il voulait Ă©viter des complications diplomatiques». Abdelkrim a regrettĂ© cette dĂ©cision quâil a considĂ©rĂ©e comme une grosse erreur Jâai manquĂ©, ces jours-lĂ , de clairvoyance politique nĂ©cessaire» 1921, comme une retombĂ©e inattendue de leurs efforts pour dĂ©truire la puissance de Raisuni, un brigand local, les troupes espagnoles approchent des secteurs inoccupĂ©s du Rif. Abdelkrim envoie Ă leur gĂ©nĂ©ral Manuel FernĂĄndez SILVESTRE Y PANTIGA 1871- 22 juillet 1921 un avertissement sâils franchissent le fleuve Amekran, il le considĂ©rerait comme un acte de guerre. FernĂĄndez Silvestre aurait ri en prenant connaissance du message. Le gĂ©nĂ©ral installe un poste militaire sur le fleuve Ă AbarrĂĄn. Le mĂȘme jour au milieu de lâaprĂšs-midi mille rifains lâavait encerclĂ© ; 179 militaires espagnols furent tuĂ©s, forçant le reste Ă la retraite. Les jours qui suivirent aprĂšs plusieurs escarmouches sanglantes pour les troupes de FernĂĄndez Silvestre un Ă©vĂ©nement inattendu se produisit. En effet mĂ©prisant Abdelkrim, FernĂĄndez Silvestre dĂ©cide de le dĂ©fier, et avec 3 000 hommes Abdelkrim parvient en deux jours grĂące Ă la ruse Ă vaincre lâEspagne. Pour lâEspagne, la bataille dâAnoual a Ă©tĂ© un vĂ©ritable dĂ©sastre. Elle y a perdu prĂšs de 16 000 soldats, rĂ©cupĂ©ra 24 000 blessĂ©s 150 canons et 25 000 fusils. En outre, 700 soldats espagnols ont Ă©tĂ© faits prisonniers. Il sâagit aussi de la premiĂšre dĂ©faite dâune puissance coloniale europĂ©enne, disposant dâune armĂ©e moderne et bien Ă©quipĂ©e devant des rĂ©sistants sans ressources, sans organisation, sans logistique ni intendance. La victoire dâAnoual a eu un immense retentissement non seulement au Maroc mais aussi dans le monde entier. Elle a eu dâimmenses consĂ©quences psychologiques et politiques, puisquâelle allait prouver quâavec des effectifs rĂ©duits, un armement lĂ©ger, mais aussi une importante mobilitĂ©, il Ă©tait possible de vaincre des armĂ©es 1er fĂ©vrier 1921, Abdelkrim proclame la premiĂšre RĂ©publique dans le monde maghrĂ©bin, et se proclame Emir, une fonction religieuse et politique. Il crĂ©a un parlement constituĂ© des chefs de tribus qui lui vota un gouvernement. Nous venons dâassister Ă la victoire dâun peuple, considĂ©rĂ©e par plusieurs, comme anormale, alors quâil a souffert de lâhĂ©gĂ©monie espagnole, dont lâarmĂ©e a Ă©tĂ© chassĂ©e. LâĂ©quilibre des forces au Maroc a changĂ© au dĂ©triment des impĂ©rialistes qui lâoccupaient. Nous ne sommes plus face Ă une petite guerre de libĂ©ration de trois millions dâhommes, mais nous sommes confrontĂ©s Ă des nations musulmanes, dont les peuples se comptent en dizaines de millions» dit Abdelkrim, lors de sa dĂ©claration dâindĂ©pendance. AL-KHATTABI nâest ni un rebelle qui cherche Ă atteindre le Roi, ni un avocat, ni un messager pour rĂ©former. Câest un patriote qui libĂšre sa terre et sâoppose Ă lâhĂ©gĂ©monie Ă©trangĂšre. De nouvelles forces sociales ont Ă©mergĂ© et rĂ©alisĂ© des rĂ©volutions pour lâEquitĂ© au sein de la sociĂ©tĂ©, lâunification du pays et la modernisation des pouvoirs» Ă©crivait dĂ©jĂ , en 1925, un Rapport du 2Ăšme bureau français, Etat-major de guerre. Abdelkrim, un nationaliste, Ă©tait un rĂ©novateur. Il abolit le droit coutumier berbĂšre, lutta contre le maraboutisme et les confrĂ©ries, notamment salafistes, et voulait enraciner un Etat moderne au Rif, prĂ©curseur de lâaction de Moustapha KEMAL en Turquie. Câest un Etat moderne soucieux des questions de justice et de rĂ©formes agraires. Chaque tribu, Ă sa tĂȘte avec une Douma assemblĂ©e Ă©lue, avait pour chef un caĂŻd dont les attributions se rĂ©vĂ©laient assez semblables Ă celles des maires de France, Ă la seule diffĂ©rence quâil possĂ©dait le pouvoir absolu, administratif et militaire dâun cercle dĂ©limitĂ©. Le caĂŻd Ă©tait chargĂ© de lâĂ©tat-civil, tenait des livres de naissances, de mariages, de dĂ©cĂšs. Le pouvoir lĂ©gislatif est confiĂ© Ă 80 dĂ©putĂ©s directement Ă©lus par les a Ă©tĂ© profondĂ©ment traumatisĂ©e par la bataille dâAnoual et mobilise 200 000 hommes, en vue de rĂ©cupĂ©rer les positions perdues jusquâĂ Tizi-Aza et voulait racheter ses prisonniers. Abdelkrim en rĂ©ponse, offre une proposition de paix nĂ©gociĂ©e, mais que les Espagnols dĂ©clinent. En 1922, Abdelkader part Ă Londres, afin de rallier Edouard CHAMBERLAIN Ă sa cause, en vain. En 1923, il se rend Ă Paris, et descend Ă lâhĂŽtel Terminus, Ă Saint-Lazare, et voulait rencontrer le prĂ©sident Raymond POINCARRE, afin dâassurer lâessor et lâindustrialisation du Rif, et acheter des avions français, pour impressionner les tribus. Avant son dĂ©part de France, sans ĂȘtre reçu par le gouvernement, il apprendra que les troupes françaises avaient dĂ©jĂ envahi lâOuergha, en vue de provoquer des soulĂšvements en masse des diffĂ©rentes tribus. Les Français considĂ©raient que le Rif devrait ĂȘtre rattachĂ© au Maroc Ils sont dans lâerreur sâils considĂšrent que le Rif fait partie du Maroc. GĂ©ographiquement notre RĂ©publique fait partie de lâAfrique. Notre langue est si singuliĂšrement diffĂ©rente des autres» dit devant ces Ă©checs attaquera les troupes françaises dans le Rif une grande effervescence rĂ©gnait dans les tribus du Rif, mais elle se calma un instant, Ă notre Ă©gard, la rĂ©bellion des tribus montagnardes. Le fait, pour nous, dâavoir mĂątĂ© en partie cette rĂ©bellion, retrempa notre courage» dit Abdelkrim. Abdelkrim ne voulait pas vraiment engager une guerre frontale avec les Français, mais ces derniers nâacceptaient pas une RĂ©publique du Rif entre le Maroc et lâAlgĂ©rie. Aussi, dĂšs 1925, la France incite le soulĂšvement des tribus en sâappuyant sur les Beni ZĂ©roual. En dĂ©cembre 1925, Abdelkrim sentait sa cause perdue, il rĂȘvait de lâindĂ©pendance du Rif, dans la modernitĂ© et lâunitĂ© Je sentais un certain flottement des tribus qui mâavaient jurĂ© fidĂ©litĂ©, et qui, jusque-lĂ , ne sâĂ©taient point dĂ©partis de leur loyalisme. LâactivitĂ© de nos officiers de renseignement avait Ă©tĂ© considĂ©rable parmi les tribus» dit-il. Toutes les tentatives dâAbdelkrim pour nĂ©gocier la paix ont Ă©chouĂ©. Les Français avaient exigĂ© quâil capitule, sans conditions, et ĂȘtre exilĂ© au Maroc. Or pour lui, les Rifains sâĂ©taient battus pour leur indĂ©pendance, jâavais personnifiĂ© leur lutte, une lutte pour leur libertĂ©. Ce nâĂ©tait pas Ă moi dâabdiquer. CâeĂ»t Ă©tĂ© trahir» dit-il. Alors, le marĂ©chal Philippe PETAIN vint avec 200 000 hommes, des avions et de lâarmement lourd. En 1926, Abdelkrim allait perdre immanquablement Jâai repris la lutte dĂ©sespĂ©rĂ©, par devoir, sans aucune lueur dâespoir, prĂ©voyant ce qui ne tardait pas Ă sâaccomplir le lĂąchage progressif de mes guerriers, la soumission rapide des tribus» Ă©crit Abdelkrim. AprĂšs la menace de gĂ©nocide, Abdelkrim se rend comme prisonnier de guerre, demandant Ă ce que les civils soient Ă©pargnĂ©s Votre civilisation est celle du fer. Vous avez de grosses bombes, donc vous ĂȘtes civilisĂ©s ; je nâai que des cartouches de fusil, donc je suis un sauvage» dira Abdelkrim, le jour de sa capitulation. En dĂ©pit de cette reddition, les puissances coloniales ne peuvent tolĂ©rer quâun tel soulĂšvement reste impuni. Ainsi dĂšs 1926 des avions munis de gaz moutarde bombarderons des villages entiers faisant des marocains du Rif les premiers civils gazĂ©s massivement dans lâHistoire, Ă cĂŽtĂ© des kurdes iraqiens gazĂ©s par les britanniques. On estime Ă plus de 150 000 le nombre de morts civils durant les annĂ©es 1925-1926, mais aucun chiffre crĂ©dible ne peut ĂȘtre 14 juillet 1926, sous lâArc de Triomphe, le gĂ©nĂ©ral fasciste Miguel PRIMO de RIVERA, entourĂ© du prĂ©sident Gaston DOUMERGUE, dâAristide BRIAND et, pour faire bonne mesure, du sultan Moulay YOUSSEF, cĂ©lĂšbrent ensemble cette victoire de la civilisation sur la barbarie». Mais que faire dâAbd El Krim, un prisonnier bien encombrant, trop cĂ©lĂšbre pour ĂȘtre Ă©liminĂ©, danger potentiel par son charisme auprĂšs des populations colonisĂ©es. En 1926, Abd el-Krim est exilĂ© Ă la RĂ©union, oĂč on lâinstalle dâabord jusquâen 1929 au ChĂąteau Morange, dans les hauteurs de Saint-Denis. Quelques annĂ©es passent. Il devient habitant de la commune rurale de Trois-Bassins, dans lâouest de lâĂźle, oĂč il achĂšte des terres et construit une belle propriĂ©tĂ©. Il y vit douze Ă quinze ans. En mai 1947, ayant finalement eu lâautorisation de sâinstaller dans le Sud de la France, il embarque Ă bord dâun navire des Messageries Maritimes en provenance dâAfrique du Sud et Ă destination de Marseille avec 52 personnes de son entourage et le cercueil de sa grand-mĂšre, le Katoomba. ArrivĂ© Ă Suez oĂč le bateau fait escale, Abdelkrim rĂ©ussit Ă sâĂ©chapper et passa la fin de sa vie en Ăgypte, oĂč il prĂ©sidera le ComitĂ© de libĂ©ration pour le Maghreb arabe». Il a donc conseillĂ© tous les leaders arabes en lutte pour lâindĂ©pendance, dont les Tunisiens et les AlgĂ©riens. Il a reprochĂ© aux Marocains de pactiser avec la France au moment oĂč lâAlgĂ©rie menait sa guerre dâindĂ©pendance. Il fallait, selon lui, unir tous les pays africains. Il a rencontrĂ© dâautres combattants en lutte, comme Che GUEVARA 1928-1967, afin que naissent un, deux, trois Vietnam». Abdekrim, au Caire, a repris le ministĂšre de la parole Des milliers de personnes mourront si la France nâaccorde pas lâindĂ©pendance Ă lâAfrique du Nord» dĂ©claration reproduite par le Monde», 20 septembre 1949. Au sortir de lâindĂ©pendance, la rĂ©pression dâune rĂ©volte du Rif fait plus de 8 000 morts entre 1958 et son sommeil et pendant le mois du Ramadan, Abdelkrim meurt, le 6 fĂ©vrier 1963, dâune crise cardiaque au Caire. Gamal Abdel NASSER 1918-1970 lui accorda des funĂ©railles nationales. De son vivant, Abdelkrim avait refusĂ© de rentrer au Maroc aprĂšs lâindĂ©pendance, et cela en dĂ©pit dâune visite de Mohamed V en 1960, au Caire. La situation, Ă ses yeux, manquait de clartĂ© Je ne mettrai pas les pieds au Maroc tant quâil y restera un soldat français» avait-il dit. Sa fille, AĂŻcha avait demandĂ©, vainement, en 2013, que sa dĂ©pouille soit ramenĂ©e au Rif mais le Roi du Maroc, avait optĂ© pour mĂ©thodes de guĂ©rilla dâAbdelkrim ont inspirĂ© les rĂ©volutionnaires du monde entier Abdelkrim Al-Khattabi a Ă©tĂ© lâun des piliers des stratĂ©gies dont jâai les bases de la guĂ©rilla» dira Mao ZE-DONG 1893-1976, devant une dĂ©lĂ©gation de lâOLP. Mais la guerre du Rif a un tel retentissement que le nom d'Abdelkrim est devenu le symbole de la dĂ©colonisation. Abdelkrim avait de son vivant, sur la pĂ©riode 1920-1925, avec quelque amertume Je suis venu trop tĂŽt».Bibliographie sĂ©lectiveAGERON Charles-Robert, La presse parisienne devant la guerre du Rif avril 1925 â mai 1926», Revue de lâOccident musulman et de la MĂ©diterranĂ©e, 1977, n°24, pages 7-28 ;AIDI Hisham, Les blessures ouvertes du Rif», Multitudes, 2017, vol 3, n°68, pages 10-18 ;Anonyme, A propos du Rif», Archives Marocaines, 1927, pages 211-240 ;Anonyme, Le Rif», Archives Marocaines, 1927, pages 175-209 ; AYACHE Germain, Les origines de la guerre du Rif, thĂšse Paris 1, Rabat, Smer, 1990, 372 pages ; BARBUSSE Henri, Contre la guerre au Maroc, Paris, Librairie de lâHumanitĂ©, 1925, 16 pages ;BARRUCAND Victor, La guerre du Riff, Laroche et Dawant, 1927, 54 pages ;BENCHABANE Mehdi, Abdelkrim AL-KHATTABI et la guerre du Rif, Ozoir-La-FerriĂšre, Albouraq, 2015, 71 pages ;BIARNAY Samuel, Etude sur les dialectes du Rif, Paris, Leroux, 1927, 600 pages ;CAMBON T. 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La paix universelle n'est pourtant pas au rendez-vous. Entre Ă©puration, transferts de populations, pogroms, nettoyage ethnique et nouveaux conflits, le
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Surson lit de mort, le maréchal de Lowendal a dit : pour sauver la France, c'est un chef comme Mandrin qu'il nous faudrait. Mandrin est un contrebandier, un justicier, un gentilhomme, un grand stratÚge. Le héros qui soulÚve une armée de fourches et de bùtons. Mandrin est le premier révolutionnaire en haillons, l'homme le plus populaire
Synopsis- 1945 - Un village se rebelle Avril 1945. La mine de sel du village d'Altaussee, dans les Alpes autrichiennes, a Ă©tĂ© choisie par Hitler et Göring pour abriter une part de la collection d'oeuvres d'art pillĂ©es pour le futur musĂ©e du FĂŒhrer Ă Linz. Prochaines diffusions - 1945 - Un village se rebelle Mercredi 20 Avril - 13h35. Casting - 1945 - Un village se
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